Un peu  de culture

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Titre : La plateforme

Fiche technique : Un long-métrage de Galder Gaztelu-Urrutia, avec Ivan Massagué, Zorion Eguileor & Antonia San Juan – Sorti en VOD sur Netflix en mars 2020.

Résumé
Dans le futur, Goreng sacrifie quelques mois de sa vie dans une prison spéciale pour obtenir un « certificat » lui permettant de s’élever dans l’échelle sociale. Il se réveille dans une cellule avec un trou au centre, d’où surgit la fameuse plateforme une fois par jour, remplie de nourritures. Toutes les deux minutes, la plateforme descend. Aux prisonniers de vider les plats qui se présentent à eux dans le temps imparti. La règle perverse réside dans l’interdiction de garder un aliment dans sa cellule. L’autre règle, totalement absurde ou égalitariste – au choix – est que les prisonniers changent d’étage chaque mois, au hasard. Ils peuvent monter et se goinfrer, ou descendre et devoir sérieusement questionner leur humanité…

Pour
Prenez Cube pour l’environnement concentrationnaire – mais virez les pièges qui rendaient le film ludique. Ajoutez la lutte des classes du Transperceneige en plus cryptée, et vous obtenez La plateforme. Avec sa structure verticale, la « théorie du ruissellement » chère à Macron est au cœur du film. Selon cette théorie, les baisses de taxes ou les bonus en faveur des plus riches profiteraient indirectement aux pauvres, avec de l’argent qui « ruissellerait » aux couches les plus basses de la société. Bien sûr, c’est un mythe… Le film en fait la démonstration : les prisonniers des étages supérieurs se gavent et chient sur ceux d’en-dessous ! Goreng a la conviction qu’il serait possible, en rationnant chaque prisonnier de façon stricte, de laisser à manger même aux étages inférieurs. Cette conviction vient de sa lecture journalière. Chaque prisonnier peut emmener un seul objet en détention, et Goreng arrive avec Don Quichotte, le grand roman qui met en scène le déni et établit pour la première fois la vérité comme subjective. Le chasseur de moulins à vent vit avec sincérité dans un monde où ses actions sont à la hauteur de ses ambitions, où il peut donner un sens à son existence. Pour lui, mieux vaut nier le réel que de sacrifier ses idéaux. Vous devinez le programme : le réel va s’imposer à Goreng. Ses rêves, ses interdits moraux et sa volonté de changer les autres vont être mis à rude épreuve.

Contre
Aux trois quarts du film, l’action bascule trop facilement dans le gore, avec un aspect « toc » de jeu vidéo. Ça dénature tout le travail d’ambiance qui a été installé précédemment. Pire : les dernières minutes sont tellement invraisemblables que j’en ai martelé l’accoudoir du canapé. Mais quel gâchis ! Et que dire de la métaphore religieuse lourdingue ?!

Note : 3/5

effacer lhistorique

Titre : Effacer l’historique

Fiche technique : Un long-métrage de Benoît Delépine & Gustave Kervern. Avec Blanche Gardin, Denis Podalydès & Corinne Masiero – Sorti en DVD en décembre 2020

Résumé
Dans un lotissement en province, trois voisins sont en prise avec les nouvelles technologies et les réseaux sociaux. Il y a Marie, victime de chantage avec une sextape, Bertrand, dont la fille est harcelée au lycée, et Christine, chauffeur VTC dépitée de voir que les notes de ses clients refusent de décoller. Ensemble, ils décident de partir en guerre contre les géants d’Internet…

Pour
Prenez le meilleur de Black Mirror (le premier épisode de la saison 3), série qui nous confronte aux dérives des nouvelles technologies, mélangez-le avec l’émission alcoolisée Groland, et vous obtenez Effacer l’historique. Drôle de cocktail, mais décapant ! Les personnages sont émouvants : on a tous eu envie, à un moment ou à un autre, de se laisser avoir par cette petite annonce qui nous promettait une occasion en or, ou par ce mail sur l’héritage d’un oncle disparu au Nigéria, ou encore par les avances d’une bombe sexuelle. Eh bien, les grolandais eux y croient dur comme fer… jusqu’à ce que la réalité les rattrape. Et comme il s’agit de « gilets jaunes » déjà éreintés par la politique de Macron, ça fait mal ! Qui faire payer quand la publicité et Internet ne tiennent pas leurs promesses ? C’est la question que pose le film, avec en prime les apparitions poilantes de Lacoste, Poelvoorde, Dedienne, Houllebecq, Berroyer et Lanners.

Contre 
Trop de longueurs et des gags parfois tombant à plat (comme le téléphone de Podalydès ou la fin de Blanche Gardin aux USA) minent le film. Ce n’est donc pas le meilleur des grolandais, qui reste le magnifique Louise Michel.

Note : 3,5/5

Basta Capital

Titre : Basta Capital

Fiche technique : Un long-métrage de Pierre Zellner. Avec Jean-Jacques Vanier, Anne-Laure Gruet & Antoine Jouanolou – Sorti en DVD en mars 2021.

Résumé
Dans un contexte social plus tendu que jamais, des activistes de gauche perdent l’un des leurs lors d’une manifestation, sous les coups des forces de l’ordre. Suite à ce drame, ils décident de profiter d’une réception pour kidnapper les patrons du CAC 40, leur voler le numéro de téléphone de Macron, et dicter ainsi la politique à venir…

Contre 
Réunion d’un groupuscule anarchisant qui se demande que faire pour mettre en place une politique anticapitaliste, succession de slogans contre les riches et les policiers. Avec une approche aussi maladroite et radicale, le réalisateur ne va prêcher que les convaincus. Et encore : comme je le suis déjà, je lève la main au-dessus de la télécommande pour arrêter et puis… ma main reste en suspens au moment où les patrons du CAC 40 sont évacués d’un camion et mis dans une prison clandestine ! Le film ne dit pas ce que sont devenus leurs gardes du corps : tués, ou du moins tabassés ? La violence des anarchistes est, dans un premier temps, camouflée, et cela m’a dérangé. Autre élément qui m’a interloqué, la présence de Danièle Obono dans le rôle d’une certaine « Diallo » (comprenez : la militante identitaire Rokhaya Diallo). Du coup, le film prend des allures de tract lourdingue de La France Insoumise. Enfin, les facilités scénaristiques sont trop visibles.

Pour 
Le culot du réalisateur est spectaculaire : voir Bouygues, Faber, Drahi, Arnault, Pinault, Bolloré, Lagardère, Bompard, Ghosn et d’autres grands patrons en train de rater la cuisson des nouilles ou de piteusement passer le balai dans un atelier est jouissif ! Les noms de leurs firmes sont cités ainsi que leurs casseroles (sociales, fiscales, environnementales). Le tout est exposé de façon didactique lors de mini interviews filmées façon Élise Lucet dans Cash Investigation. Mais arrivée à la moitié du film, la « téléréalité des taulards pétés de thunes » devient lassante. J’ai baillé en me demandant si aller au bout en valait la peine… Et puis, à la mécanique répétitive est venu s’ajouter l’élément que j’attendais : l’émergence de la violence. Le film n’est donc pas naïf, mais pose tardivement la question du degré minimal de violence pour accomplir un objectif aussi grandiose que la révolution.

Note : 2/5

Le Marteau