Rentrée

Je n’en peux plus de la rentrée de septembre et de ses marronniers…

Regarder le JT en septembre, c’est la garantie de se coltiner un reportage chez Juliette et Hugo, « les parents de trois bambins qui font leur rentrée des classes. Ils ont préparé leur cartable depuis une semaine, déjà… » La journaliste, avec une voix taquine, va probablement dire ce genre de banalités avant de demander aux mioches s’ils sont contents de retourner à l’école, et on verra le petit Kenzo, regardant ses parents et récitant la phrase qu’on lui a demandé de dire : « Oui, ze sssuis content », et j’adorerais voir les rush du reportage, ceux où le gamin dit que non, qu’il n’a pas envie de revoir la maîtresse, qu’elle donne trop de devoirs, et l’après-midi, elle sent mauvais de la bouche, comme Papi Jacques après le repas de Noël quand il somnole et qu’il touche les fesses de Tata Jeannick ; et le grand frère qui vient ajouter qu’elle demande toujours aux filles de surveiller la classe quand elle va dans le couloir, « jamais aux garçons, comme par hasard, et on le sait, nous, pourquoi elle va dans le couloir, c’est pour péter en scred, parce qu’une fois elle m’avait viré de la classe mais elle s’en souvenait plus et elle était sortie pour péter juste devant moi ! » Mais non, malheureusement, nous n’aurons que la version mièvre, la version à la Pernaut, quoi.

Et on verra tout ce petit monde se préparer, aller à pied jusque devant l’école où des parents pleurent, émus, et où des maîtresses souriantes et enthousiastes reprennent du service, alors que tout le monde sait que ça fait une semaine qu’elles ne dorment plus, qu’elles songent à se suicider depuis qu’elles ont vu, sur la liste des classes, que cette année, c’est à leur tour d’avoir Taïronne et Dyliano, les deux terribles que tout le monde se refile et qui vont leur faire péter le budget d’antidépresseurs et de mojitos.

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Justement, un reportage nous présentera Séverine, jeune enseignante stagiaire qui vit sa première rentrée, et c’est clair que c’est elle qu’il faut suivre, car elle est motivée et enjouée, alors qu’il suffirait d’aller dans la classe d’à côté, celle de madame Gravier ou de monsieur Henriaut, peu importe, les deux ont suffisamment d’expérience pour connaître la réalité du métier, et ils ne manqueraient pas de taper sur Blanquer, sur ses stratégies de communication grossières, sur la misère du système éducatif, sur ces enseignants à peine formés, balancés comme ça, au dernier moment, le jour-même de la rentrée, dans une classe à 80 bornes de chez eux, ou cette classe de CM2 ingérable comptant 30 élèves, dont 13 en grandes difficultés… mais bon, un marronnier, c’est fait pour être joyeux, pour faire sourire les papis et les mamies, et aussi pour leur donner quelques repères temporels, sans quoi ils ne sauraient pas à quel moment de l’année on se trouve.

En même temps, les infos, en ce moment, c’est l’Apocalypse planétaire, Mère Nature qui nous dérouille et nous asphyxie, avec la promesse que ce n’est qu’un début, alors bon… ce petit reportage sur la rentrée, c’est une agréable respiration finalement.

Je l’aime bien, moi, la rentrée de septembre et ses marronniers.

David Berry

Narration : Mélaka – musique : PoKo