Les dangers de la forêt amazonienne

Certains d’entre nos lecteurs masculins se rappelleront avec émotion les catalogues La Redoute de leur enfance. On choisissait un produit, on le commandait, et on le recevait par La Poste…

Alors, puisque la vente par correspondance existe depuis plus d’un siècle, qu’est-ce qui est si nouveau avec l’entreprise Amazon, et pourquoi la déteste-t-on autant ? D’une part, parce qu’elle tue le petit commerce. D’autre part parce qu’elle a participé à affaiblir La Poste, notre service public. Mais aussi parce qu’elle pratique un modèle économique capitaliste radicalisé, des plus violents pour ses salariés.

Rappelons quand même qu’Amazon est une entreprise qui n’a quasiment rien inventé, qui ne fabrique rien, et qui se contente de livrer les produits des autres. C’est à peine plus que La Poste, et ses profits battent des records qui auraient pu être, au moins en partie, ceux de La Poste. Coïncidence ou pas, ces profits surviennent en même temps que le démantèlement planifié des services publics : depuis une quinzaine d’années, près de la moitié des « vrais » bureaux de poste ont fermé, et on continue de déplorer des manques d’effectifs, des conditions de travail difficiles, des tournées de facteurs rallongées, etc.

Père noel Amazon

En plus de détruire le service public postal, Amazon diminue ses coûts de fonctionnement en évitant de payer des impôts, en sous-payant ses employés, en les précarisant, en les surveillant, en entravant les syndicats etc. Pendant le premier confinement, alors que ses recettes explosaient, Amazon a tardé à mettre en place des conditions sanitaires décentes, et elle a licencié ceux qui s’en plaignaient. Pourtant cette entreprise s’enrichit au point que son patron, Jeff Bezos, est devenu l’homme le plus riche sur terre, et elle pourrait facilement améliorer sa réputation en accordant à ses travailleurs les meilleures conditions de travail du domaine. Certes, les patrons et les actionnaires verraient leurs profits se réduire un peu, mais ils sont tellement énormes, qu’il y a de la marge. Ils pourraient même finir par s’y retrouver, avec plus de clients et moins de mouvements sociaux.

Bizarre ce nouveau confinement. J’en suis à donner des conseils à Jeff Bezos, alors que mon premier réflexe aurait été de vouloir le dépouiller, de transformer Amazon en coopérative, et de la nationaliser. Mais voilà que je m’attendris à l’aider à survivre aux révoltes légitimes qui vont lui péter à la gueule. Qu’est-ce qui m’arrive ? Peut-être la Covid-19 ?

Dror

Narration : Félix Lobo