La chanson politique  du mois

Eric Bibb est un guitariste et chanteur de blues américain, installé en Europe depuis le début de sa carrière en 1994. Génial lorsqu’il est tout seul à la guitare acoustique, il sait aussi s’entourer de musiciens de talent qu’on retrouve sur sa trentaine d’albums : son père Leon Bibb, Mavis Staples, Taj Mahal, Charlie Musselwhite, Mamadou Diabate, Habib Koité, ou le français Jean-Jacques Milteau…

En 2018, il exprimait déjà dans son morceau What’s he gonna say today son désarroi face aux fake news quotidiennes du président Donald Trump. Ce mois-ci, il sort un nouveau disque, Dear America, où sa plume fouille toujours plus les turpitudes de la société américaine. On y trouve Emmett’s Ghost, avec le grand Ron Carter à la contrebasse. Cette chanson raconte, 80 ans après la naissance de Emmett Till, le sort de ce jeune noir torturé et assassiné en 1955, à l’âge de 14 ans, pour avoir parlé à une femme blanche. Les thèmes abordés par Eric Bibb sont variés et universels, tels que le joli duo Born of a Woman, avec Shaneeka Simon, sur les violences conjugales.

Son morceau Whole World’s Got the Blues, avec la guitare électrique de Eric Gales, est l’une de ces pépites de l’année 2021 qui capturent l’esprit du moment. Aux dires de Bibb, cette chanson souligne autant les défis consécutifs à la pandémie de Covid-19 que l’ubiquité du blues autour du monde : « Everywhere you turn, you’re looking at sad, sad news. Seems like the whole world’s got the blues » (Où que tu regardes, tout ce que tu vois ne sont que de tristes, tristes nouvelles. Le monde entier semble avoir le blues). Il y fait allusion au blues que suscitent les frontières, la situation au Moyen-Orient, Wall Street…

En l’écoutant, on se demande si la fin est optimiste : « People what’s going on ? How can we break this suffering spell ? I pray we gonna make it, but only time will tell » (Dites, que se passe-t-il ? Comment peut-on rompre ce sortilège douloureux ? Je prie que nous y arrivions, mais seul le temps nous le dira). Ce qui est sûr, c’est que si on s’en sort, ce sera grâce à la musique, au blues, à Eric Bibb et à ses ami.es. On compte sur elles et sur eux…

Dror