2021 : année  de la voiture autonome ?

Quand j’étais petit, les voitures volantes de Retour vers le futur 2 étaient la promesse des années 2000. Mais on est en 2021, toujours cloués au sol à s’emmerder comme des rats morts. On aimerait croire au Père Noël toute sa vie. Pourtant, il va bien falloir l’accepter, la réalité : on ne volera pas, on ne fera pas joyeusement tout péter dans le ciel comme dans After Burner. Les bagnoles sont condamnées à avoir des roues à la place des réacteurs, et à devoir se renifler le cul indéfiniment dans les bouchons.

Ça se traîne et ça pollue. Certes, le diesel et les particules fines sont progressivement bannis des centres-villes, mais le moteur à essence est tout aussi problématique avec ses rejets en dioxyde de carbone. Les voitures GPL (au gaz) polluent plus que les électriques.  Les voitures hybrides (essence + électrique) ont pour défaut une consommation élevée de carburant à cause du poids du moteur et des batteries. Même les voitures 100% électrique ou à l’hydrogène sont décriées, tant pour la fabrication des batteries (pollution dans les pays pauvres) que pour la gestion en bout de chaîne (on ne sait pas quoi faire des déchets radioactifs).

Ça y est, je vous ai bien sapé le moral ? C’est pas fini ! Le rêve des enfants d’aujourd’hui, c’est la voiture autonome. Concrètement, on sera toujours coincés dans les embouteillages, sauf qu’on s’fera moins chier ! Le conducteur, c’est l’I.A. du tableau de bord, donc tout le monde dans la voiture est de facto passager. Un long voyage en famille ? On sort l’appareil à raclette et on se tape un gueuleton ! Un trajet en couple ? On se fout à poil et on choisit une position du Kâma-Sûtra ! Une course à faire en solo ? Position couchette avec une paille dans la bouteille de whisky tout en jouant à Mario Kart !

En janvier 2016, Travis Kalanick, fondateur d’Uber, estimait que l’initiative serait rentable dès 2018. En mai 2016, il croyait qu’il ferait rouler 13.000 voitures sans chauffeur en 2019. En septembre 2016, il voulait lancer 75.000 véhicules sur les routes américaines et planifiait un service opérationnel dans 13 villes en 2022 !

On en est très, mais alors très loin… Que s’est-il passé ? La réussite de la voiture autonome réside en un mot : sécurité. À ce jour, les accidents mortels sont au nombre de trois : les deux premiers concernaient des conducteurs engagés par les constructeurs et n’ont pas suscité d’émotion particulière. Il n’en va pas de même pour la troisième victime, qui marchait sur la route (en dehors des clous) la nuit en Arizona le 18 mars 2018. Sa mort a choqué le monde entier. Conséquence : l’état de l’Arizona a interdit au constructeur Uber d’effectuer d’autres tests sur son territoire.

embouteillage aux abords du port de douvres en angleterre le 24 juillet 2016 5642517 1

La mort d’un piéton a suffi pour faire basculer l’opinion publique de l’euphorie à la défiance. Je vais vous faire un scoop : ce ne sera pas le dernier mort. Il y en aura d’autres, d’une part parce que le risque zéro n’existe pas. D’autre part, parce que rien n’est vraiment prêt au niveau des infrastructures : la 5G n’est pas encore déployée partout alors qu’elle est essentielle pour permettre à l’I.A. de prendre les bonnes décisions à temps.

Enfin, tant que les voitures autonomes ne constitueront pas la majorité du parc automobile, elles devront co-exister avec des conducteurs humains. Or, 92 % des accidents actuels sont dus à un mauvais comportement du conducteur (alcool, stupéfiant, inattention, fatigue, imprudence). Les constructeurs se trouvent ainsi devant un obstacle quasi infranchissable : plus il y aura d’accidents, plus la défiance des populations augmentera. Moins les  gouvernements autoriseront de tests, moins les voitures autonomes vont pouvoir s’améliorer et s’imposer. L’impact médiatique du piéton tué en 2018 a été tellement négatif que la firme Uber a interrompu son programme, puis a finalement annoncé le 8 décembre 2020 qu’elle abandonnait les voitures autonomes. Ses pertes se comptent en milliards de dollars, de quoi décourager les autres constructeurs et briser des rêves de gosse.

Le Marteau

Narration : Mélaka